Pierres de patience

Publié le 17 Mars 2013

Combien les femmes du monde entier devront-elles encore faire éclater de pierres de patience auxquelles elles auront confié leurs souffrances avant celles-ci ne cessent ?

Comment éradiquera-t-on cette violence masculine qui surgit de toute part et dont chaque jour nous apporte son lot d'horreurs commises sur la terre par des hommes dont la haine des femmes paraît sans limite tout comme leur imagination morbide.

Pour nourrir votre réflexion sur le sujet, je vous encourage à découvrir au plus vite la bouleversante Golshifteh Farahani dans « Syngue Sabour », le film d’Atiq Rahimi, réalisé d'après le roman éponyme qui lui a valu le prix Goncourt en 2008. Alors que sifflent les balles et tombent les roquettes sur le quartier, par un long monologue qui s'adresse à un mari immobilisé dans un coma provoqué par une balle dans la nuque suite à une querelle de mâles stupides, elle tisse la voile de sa liberté dans laquelle un vent de plus en plus fort va s'engouffrer pour lui permettre - peut-être - de prendre le large. En mettant sa sensibilité (aussi) à l'écoute de celle des femmes, Atiq Rahimi fait vibrer toutes les cordes de l'âme humaine - de son infâme noirceur à sa plus grande clarté. On aimerait qu'ils soient plus nombreux à la cultiver et à l'écouter pour qu'aucun ordre venu "d'en haut", aucune écriture "sainte", aucune loi inique ne servent à les dédouaner de leurs exactions, de leurs haines ou de leurs tendances barbares ou perverses. Comme le dit la tante dans le film : "Ceux qui ne savent pas faire l'amour font la guerre". Ils ont nombreux à préférer tenir la crosse d'un fusil (même dans un jeu vidéo) plutôt que de gagner l'amour des femmes en cultivant leurs plus belles qualités.

Cela me renvoie aux travaux de la 57ème session de la Commission on the Status of Women qui vient de se tenir à l'Onu (New-York) et visait l'éradication des violences faites aux femmes. Si les 193 états se sont mis d'accord sur un texte stipulant que les États sont sommés de ne pas se prévaloir des coutumes, traditions ou considérations religieuses pour justifier leur refus d'éradiquer les violences faites aux filles et aux femmes, il a fallu faire face à une opposition qui allait de l'Iran au Vatican en passant par la Russie et la colère du Grand Mufti de Libye, cheikh Sadek Al-Ghariani (cf http://www.rue89.com/2013/03/13/une-fatwa-contre-une-declaration-de-lonu-trop-favorable-aux-femmes-240511).

Ce texte s'arrêtant là où commencent les lois des pays concernés, il ressemble davantage au chant d'une belle sirène qu'à une avancée réelle pour que les femmes accèdent enfin à l'universalité des droits humains qui devrait leur garantir comme aux hommes à la fois le respect de leur intégrité physique, la libre disposition de leurs corps et un complet libre-arbitre en matière de religion, de mariage, de sexualité ou de reproduction. Toutes libertés que les religieux et conservateurs de tous poils et du monde entier s'associent toujours pour les en priver.

La domination masculine reste omniprésente, et les femmes et féministes de tous les pays devront savoir s'unir plus étroitement pour en venir à bout. La laïcité restant sans aucun doute leur meilleure arme, j'encourage celles (et ceux) qui en bénéficient à la défendre et à la promouvoir sans faiblir tout en en respectant l'esprit. Aucune théocratie ne permet l'émancipation du genre humain, aucun accommodement "raisonnable" ne respecte l'universalité des droits humains et pour penser les rapports entre l'église, le pouvoir politique et la justice des hommes, je vous propose d'aller à la Belle Etoile à Saint-Denis (93), voir le spectacle de la Cie Jolie Môme : Faust et l’homme ordinaire
du 15 au 31 Mars 2013.

http://www.cie-joliemome.org/spip.php?article748

 

Vous y découvrirez l'histoire d'un prêtre peu ordinaire, Thomas Münzer,
prêtre itinérant et l'un des chefs religieux de la guerre des paysans en Allemagne au XVIe siècle. Il prônait la fin de la domination des puissants et de l'église sur les plus faibles qui subissaient quotiennement des injustices de leur part. Leurs récoltes étaient accaparées ou saccagées, la justice ne leur était pas rendue, les femmes étaient "prises" comme leurs autres biens et les viols n'étaient pas punis mais les femmes traitées en putains. Après avoir été un disciple de Luther, il lui reprochera d'être trop conciliants avec les princes. Münzer finira décapité par ces mêmes princes qui écraseront son armée de paysans avec les armes les plus modernes de l'époque.(canons)

Il semblerait que les choses n'aient guère changé en cinq siècles puisque le nouveau pape de la chrétienté penchait lui aussi du côté du pouvoir pendant la dictature en Argentine - pays où une branche de l'Action française s'est installée en 1958.


Une enquête approfondie sur Bergoglio a été effectuée par le journaliste Horacio  Verbitsky dans son ouvrage El silencio (Le silence)  paru en 2005.

Il dit de Bergoglio: "C'est un homme très cultivé et  j'ai eu de bonnes relations avec lui, et dans le livre je le  remercie pour sa collaboration avec moi. Mais malheureusement pour  Bergoglio, j'ai trouvé à la Chancellerie les documents qui  l'impliquent directement dans la répression en terme de complicité  formelle. Il félicitait les prêtres qui faisaient un travail  social important et après il les dénonçait comme  subversifs aux militaires. Je n'ai rien inventé !... Ce  sont les documents officiels de la dictature qui le disent !" 

cf <http://edant.clarin.com/suplementos/cultura/2005/02/26/u-928004.htm> 

 

Si vous êtes loin de la Seine-Saint-Denis, vous pouvez aussi voir Wajdja, premier film saoudien et film d'une femme, Haifaa Al Mansour qui affronte tous les tabous en nous racontant l'obstination d'une petite fille dont le désir le plus cher peut nous paraître dérisoire, mais en Arabie il est proprement révolutionnaire. Dans les pays où les enfants sont gavés de technologies et d'écrans, les bicyclettes sont des objets bien communs voire démodés. Pourtant c'est un des premiers outils de l'autonomie des enfants, celui qui peut les rendre maîtres de leurs déplacements et leur permettre de commencer à s'éloigner de leur famille en toute liberté. Jeu ou moyen de locomotion, il est inaccessible aux filles dans un pays où presque tout leur est interdit (chanter, conduire, travailler dans un milieu mixte, sortir seule, aller au cinéma- il n'y en a pas en Arabie, sortir tête nue, choisir leur mari, parler aux hommes ou en être vues...) Le sourire lumineux de la jeune actrice qui porte le film avec espièglerie et gravité se brise parfois sur les injustices quotidiennement faites aux femmes dans son pays et qui sont peintes par petites touches délicates, reflétées dans les yeux de cette enfant pugnace et rebelle !

Rédigé par Olympe

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